Un raz-de-marée rouge… qui s’est calmé en bord de mer
- marchesglobauxhec
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Alors que les sondages Léger et Qc125 annonçaient une vague majoritaire rouge, le verdict des urnes a contredit les prédictions. Les libéraux obtiennent pour l’instant 168 sièges, dont 155 élus et 13 en tête. Une performance solide, mais en deçà des attentes gonflées. Cette élection a cristallisé plusieurs enjeux fondamentaux, et les Canadiens ont tranché avec un taux de participation estimé à 68,5 %, potentiellement le plus élevé depuis 1993 — si cette estimation se confirme, elle surpassera même celui de 2015 (68,3 %), lors du tout premier mandat de Justin Trudeau.
La résurrection rouge
Même si 168 sièges peuvent sembler modestes face aux 172 et plus anticipés, cette percée reste spectaculaire. Rappelons qu’à la fin de 2024, les libéraux plafonnaient à 20 % dans les intentions de vote, loin derrière les conservateurs qui caracolaient vers les 220 sièges. Le tournant? La démission de Justin Trudeau, suivie de l’entrée en scène de Mark Carney. Ancien gouverneur de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre, Carney a séduit un électorat modéré, notamment chez les bloquistes et les néo-démocrates, grâce à son profil technocratique rassurant. Au Québec c’est une vague rouge ayant obtenue 43 sièges libéraux, la dernière fois qu’il y en a eu autant ce fut en 1980 lors de l’élection de Pierre-Elliot Trudeau. La peur de Pierre Poilievre comme premier ministre a grandement influencé l’électorat québécois à détourner le dos au Bloc pour les libéraux.
NPD : naufrage orange et cloche du glas
Ce n’est pas une déconvenue, c’est un désastre. Le NPD a connu un effondrement historique, recueillant à peine 6,3 % du vote populaire (environ 1,2 million de voix), contre 17,83 % en 2021. Une hémorragie de plus de la moitié de son électorat. Le chef Jagmeet Singh, visiblement ébranlé, a annoncé sa démission à 00h40. C’est le plus faible score du parti depuis sa fondation. Le choc est brutal, et les lendemains s’annoncent incertains pour l’avenir de la gauche fédérale.
Bloc québécois : le roi sans couronne
Le Bloc perd 9 sièges — un recul attendu mais amer. Pour Yves-François Blanchet, le scénario rêvé aurait été une égalité serrée entre libéraux et conservateurs, qui aurait donné au Bloc un levier de négociation. Ce rêve s’effondre avec l’échec des conservateurs et une poussée libérale plus forte que prévu. Malgré tout, dans un contexte de gouvernement minoritaire, le Bloc conserve un rôle d’influence non négligeable. La formation demeure déterminée à défendre les intérêts du Québec avec vigueur.
Les conservateurs tombent du piédestal
Le grand perdant de la soirée : Pierre Poilievre. Les conservateurs subissent une chute brutale depuis l’arrivée de Mark Carney. Une réalité s’impose : Poilievre profitait peut-être plus du rejet de Trudeau que d’un réel appui populaire. Mais le coup de grâce survient à Carleton, où Poilievre perd sa propre circonscription face au libéral Bruce Fanjoy, qui l’emporte avec une avance de 3 793 voix. Une humiliation personnelle qui pourrait bien sonner le début de la fin pour le chef conservateur.
Coalition ou confusion?
Avec 168 sièges, les libéraux restent à seulement quatre sièges d’une majorité. La voie la plus plausible semble être la reconduction de la coalition NPD-libéraux, bien que le départ de Jagmeet Singh introduise une dose d’incertitude. Une alliance ponctuelle avec le Bloc n’est pas non plus à exclure. Malheureusement, pour le Bloc, le NPD n’a pas le pouvoir qu’il avait et maintenant dépouillé de chef il n’a pas vraiment le choix autre que de s’allier avec le parti Libéral.
Un pays divisé, une démocratie vivante
C’est la troisième fois consécutive qu’un gouvernement minoritaire est élu au Canada. Si les Canadiens semblent rejeter les majorités écrasantes, ils maintiennent néanmoins le Parti libéral au pouvoir. Le message est clair : vigilance, compromis et collaboration. Reste à voir si ce fragile équilibre suffira à faire face à la baudruche jaune qui enfle chez nos voisins du Sud.
Maxime Renaud-Blondeau