top of page

Quand Moscou teste ses muscles, l’Europe retient son souffle

ree

Moscou — La Russie a lancé entre les 12 et 16 septembre derniers les exercices militaires Zapad 2025, une vaste simulation d’invasion occidentale qui mobilise 100 000 soldats et 10 000 systèmes d’armement sur 41 terrains d’entraînement. Ces manœuvres ont mené à l’intrusion de drones et avions de chasse dans l’espace aérien des pays limitrophes, ce qui suscite la crainte et l’inquiétude des pays membres de l’OTAN et de l’Union Européenne.


Ces manœuvres, organisées conjointement avec la Biélorussie, incluent notamment une simulation de frappe nucléaire, ce qui ajoute à la gravité perçue de l’exercice. Officiellement, selon ce qu’a affirmé Vladimir Poutine dans une allocution retransmise à la télévision d’État, l’objectif est de « mettre en place tous les éléments nécessaires à la défense inconditionnelle de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et à la protection contre toute agression. »


Ces exercices sont les premiers depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022. Ils s’inscrivent dans une longue tradition : les exercices Zapad ont lieu tous les quatre ans. Mais cette édition soulève une inquiétude sans précédent en Europe.


Varsovie et Tallinn sonnent l’alarme : jusqu’où ira la provocation ?

Varsovie a confirmé que plusieurs drones russes, venus d’Ukraine et de Biélorussie, ont pénétré son espace aérien. Pour la première fois depuis le début du conflit ukrainien, l’OTAN a dû intervenir directement : des avions polonais et alliés ont abattu les appareils. Deux personnes ont été arrêtées et la Biélorussie est soupçonnée d’être impliquée. 


La tension est montée d’un cran vendredi, lorsque l’Estonie a dénoncé la violation de son ciel par trois MiG-31 russes, restés 12 minutes au-dessus du golfe de Finlande avant d’être interceptés par des F-35 italiens. Tallinn a immédiatement demandé des consultations d’urgence au titre de l’Article 4 de l’OTAN. « Une telle violation est totalement inacceptable », a martelé le Premier ministre estonien.


La Scandinavie n’a pas été épargnée non plus. Lundi soir, deux à trois drones de grande taille ont paralysé l’aéroport de Copenhague pendant près de quatre heures, affectant 20 000 passagers et des dizaines de vols. La même nuit, Oslo a brièvement fermé son espace aérien près de l’aéroport de Gardermoen pour des raisons similaires. « L’attaque la plus grave contre une infrastructure critique » au Danemark, a dénoncé la première ministre Mette Frederiksen. Cependant, il est « trop tôt » pour savoir si la Russie est impliquée, a estimé le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte.  


Quand la rhétorique russe rencontre la fermeté occidentale

L’ambassadeur russe en France, Alexeï Meshkov, a déclaré : « Vous savez, il y a de nombreux avions de l’OTAN qui violent l’espace aérien russe, délibérément ou non, mais cela arrive assez souvent. Ils ne sont pas abattus ensuite » (traduction de l’anglais, The Kyiv Independent). 

ree

L’argument n’a pas convaincu. Emmanuel Macron a appelé les alliés de l’OTAN à monter d’un cran leur riposte en cas de nouvelles provocations, notamment dans l’espace aérien. De son côté, l’Alliance atlantique a qualifié Zapad 2025 et les intrusions russes de « provocation claire et dangereuse ».

« La Russie cherche à en apprendre plus sur les capacités [militaires] réelles de l’alliance », analyse Anessa Kimball, professeure de relations internationales à l’Université Laval et codirectrice du Réseau canadien sur la défense et la sécurité (Le Devoir).


Jeu d’échecs diplomatique

L’opération dépasse largement la dimension militaire. Moscou a convié des contingents du Bangladesh, de l’Inde, de l’Iran, du Burkina Faso, du Congo et du Mali, cherchant à élargir son réseau d’appuis au-delà de ses alliés traditionnels. Dans les coulisses, les sommets des BRICS et de l’Organisation de coopération de Shanghai, qui a réuni début septembre une vingtaine de pays tels que le Pakistan, la Russie, la Chine, la Corée du Nord, l’Iran et l’Arabie Saoudite offrent à la Russie une tribune diplomatique internationale qui contraste avec l’isolement que lui impose l’Occident. 


En parallèle, le président biélorusse Alexandre Loukachenko a surpris en annonçant la libération de 52 prisonniers politiques américains sur plus de 1200 encore détenus. À Washington, certains y voient un signe d’ouverture : l’administration Trump espère que Minsk pourrait jouer le rôle d’intermédiaire bienveillant entre le Kremlin et la Maison-Blanche. 


L’Europe sur ses gardes

Pour l’OTAN, la multiplication des incidents — drones abattus en Pologne, avions interceptés en Estonie, aéroports paralysés au Danemark et en Norvège — marque un seuil inédit depuis 2022. Si le Kremlin parle de « défense souveraine », les voisins de la Russie y voient surtout une démonstration de force au parfum de provocation, qui passe par les exercices militaires explicites et les tentatives de désinformation de Moscou. 


Un parfum qui, à mesure que les manœuvres s’intensifient, inquiète toute l’Europe.

 

Pierre-Louis Chesseron, Maha Barrak, Marc-Antoine Labrie, Louis-Félix Cloutier

 

 

@ 2023 MGH. Tout droits résérvés

  • Instagram
  • LinkedIn

S'abonner

Abonnez-vous à notre infolettre pour rester à jour et ne jamais manquer une publication!

Merci beaucoup!

bottom of page