Le déclin de l’impérialisme occidental : un tournant historique
- marchesglobauxhec
- 29 oct.
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Alors que les États-Unis réduisent leur présence internationale et que le dollar américain perd graduellement son statut dominant, la montée de la Chine et de l’Inde marque la fin d’un cycle historique où l’Occident fixait seul les règles du monde. Pour mieux comprendre les enjeux de ce déclin, nous avons sollicité Pascal Bédard, maître d’enseignement au département d’économie appliquée de HEC Montréal.
De la suprématie à la remise en question
L’impérialisme a marqué l’histoire du monde pendant des siècles. Cependant, l’impérialisme occidental, notamment celui des États-Unis et de l’URSS, date de la guerre froide. Les deux puissances ont exercé un impérialisme par procuration, notamment en Amérique latine et en Asie. En revanche, ces derniers temps, on remarque un retrait progressif des Américains dans les affaires mondiales. Selon Pascal Bédard, ceci est dû à la population américaine qui est fatiguée de jouer le rôle de protecteur dans le cas de plusieurs pays dont Taïwan.
« Ce n’est pas uniquement une pression internationale qui pousse les États-Unis à se retirer, mais surtout un repli identitaire intérieur, un rejet de l’élite et des institutions mondiales comme l’ONU, l’OMS ou l’OMC. »
-Pascal Bédard
De plus, la nouvelle politique de droits de douane implémentée par Trump a amené une certaine amertume des pays étrangers envers les États-Unis, notamment dans le cas de l’Inde. En parallèle, Bédard souligne aussi que l’industrialisation de la Chine et de l’Inde entraine une autonomie pour ces deux pays, contribuant ainsi au déclin de la puissance américaine. Toutefois, Bédard précise que ce déclin demeure limité, car le principal marché de consommateurs pour la Chine et l’Inde est le peuple américain, donc peu importe, ces pays restent dépendants. Cela explique aussi pourquoi nous voyons plus de transactions faites en yuan ou en euro au lieu de dollars américains. En effet, la place du dollar américain a énormément diminué. En 2014, 50 % des réserves mondiales étaient en dollars américains et en 2024 ce pourcentage a diminué à environ 33 %.
Conséquences du déclin pour les parties concernées
Les États-Unis sont la puissance économique mondiale depuis des années. Donc, son retrait engendre plusieurs conséquences économiques non seulement pour eux mais pour le reste du monde. Sa perte de valeur pourrait entraîner des produits moins chers, ce qui pourrait diminuer la dette commerciale (différence entre exportations et importations américaines) et ce qui pourrait aussi entraîner l’installation d’usines et de travail dans les usines. Par contre, il faudrait faire attention, car cette dévalorisation pourrait entraîner de similaires conséquences comme lorsque Nixon a déconnecté la valeur du dollar de l’or dans les années 70. Un marché trop divisé pourrait aussi entraîner une hausse des prix à travers le monde. Par conséquent, les États-Unis devront payer plus cher pour leur emprunt et donc diminuer leurs dépenses. Ce déclin a aussi fait en sorte que de 2014 à 2021, 57 % du PIB mondial provenait de l’Asie.

Pascal Bédard mentionne qu’en général, le déclin amène plus d’options à la Chine et à l’Inde en termes d’options de partenaires commerciaux. Des partenaires commerciaux de l’Inde incluent l’Arabie saoudite avec un échange total de 26,94 milliards, les Émirats Arabes Unis avec un total de 68,7 milliards et Singapour avec 23,45 milliards. Et pour la Chine, ces partenaires commerciaux en exportation consistent en l’ASEAN (Association des nations d’Asie du Sud-Est) avec 53,7 milliards, l’Union européenne avec 501,2 milliards et Hong Kong avec 274,6 milliards. De plus, l’Inde ne profite pas autant que la Chine de ce déclin, car l’Inde a une économie plus fragmentée, moins en expansion. En 2024, la Chine a enregistré un PIB d’environ 18 milliards de dollars tandis que celui de l’Inde a été entre 3,7 et 4,4 millions de dollars.
Un défi de diversification pour le Canada et le Québec
Selon Bédard, le recul des États-Unis sur la scène internationale a des effets directs sur le Canada et le Québec, dont l’économie demeure essentiellement liée à celle de leur voisin. Même si le Canada intensifie son commerce à l’étranger, comme Carney le fait actuellement, il dépendra toujours des États-Unis comme principal partenaire, simplement parce qu’il constitue son unique voisin géographique. Dans un contexte où des pays orientaux, tels que la Chine et l’Inde, gagnent en influence, le Canada doit diversifier ses options sans briser son fondement nord-américain.

Sur le plan financier, la perte de valeur graduelle du dollar américain peut ouvrir de nouvelles opportunités, mais il augmente aussi l’incertitude des marchés. Pour le Québec, cette situation présente un défi, mais aussi une possibilité de mettre en évidence une économie plus autonome. Comme l’indique Pascal Bédard, les secteurs stratégiques québécois, tels que l’énergie propre, pourraient tirer avantage d’un monde à pouvoirs partagés, à condition d’adapter rapidement leurs stratégies.
Sarah Ait Siselmi, Coraly Leilah Duplessis, Fatine Moumni



